Défi : Construire un cadre de négociation collective sur les données personnelles

Cette fiche défi a été rédigée en septembre 2018, c’est une version provisoire, donc incomplète, pour documenter le sujet. Elle sera enrichie pendant la phase de contribution en ligne (à partir de février 2019).

Citations

Only by thinking about digital platforms as collective creations can we construct a new model that offers something of real value, driven by public purpose. We’re never far from a media story that stirs up a debate about the need to regulate tech companies, which creates a sense that there’s a war between their interests and those of national governments. We need to move beyond this narrative. The digital economy must be subject to the needs of all sides; it’s a partnership of equals where regulators should have the confidence to be market shapers and value creators.”, Mariana Mazzucato (source : « Let’s make private data into a public good » dans MIT Technology Review )

Nos informations ne sont plus « chez nous ». Elles sont disséminées sur les profils Facebook de nos amis, dans les bases de données des commerçants qui tracent nos transactions, dans les boîtes noires algorithmiques qui captent le trafic Internet pour les services de renseignement. Il n’y a rien de plus collectif qu’une donnée personnelle. La question est donc moins de la protéger de l’action d’intrus qui cherchent à en pénétrer la profondeur que d’harmoniser une pluralité d’acteurs sociaux qui veulent y avoir accès.”, Antonio Casilli, dans « La vie privé des travailleurs de la donnée » publié dans Le Monde.

Pourquoi nous avons besoin d’un “reset” (ce qui se passe mal, ce qui ne peut plus durer)

L’apparition des plateformes numériques – qu’elles soient sociales (Facebook, Instagram), culturelles (Spotify, Wikipédia), commerciales (Amazon), servicielles (Booking) ou d’intermédiation (Uber, AirBnB, Amazon Mechanical Turk), … – a pour conséquence une production énorme de données personnelles, dont l’exploitation crée de la valeur à l’avantage quasi exclusif des plateformes. Les statuts des utilisateurs des plateformes sont multiples (usager d’un service gratuit, voire payant ; indépendant vendant sa force travail ; contributeur d’un site collaboratif ; propriétaire d’un appartement ; …) mais ils ont pour point commun de fournir un travail de production et d’enrichissement des données sans que ne soit respecté le droit des personnes et/ou le droit du travail. Différents mécanismes de protection sociale devraient être mis en place pour garantir les droits des personnes, dans un cadre de négociation collective, pour éviter l’approche individualiste et capitaliste, et forger des relations numériques équitables et éthiques.

Des visions alternatives existent déjà

Discuter collectivement le fondement d’une éthique dans l’agencement de nos relations numériques nous amène nécessairement à regarder en face les grands équilibres économiques, l’exploitation et les mécanismes de prédation des grandes firmes sur les travailleurs les plus précaires, et souligne tout autant l’urgence de la construction de responsabilités collectives pour y répondre. Il ne faut pourtant pas nous priver de penser des environnements et des pratiques numériques beaucoup plus émancipatrices, en s’appuyant sur ce que le monde du logiciel libre, le mouvement des communs et de l’économie solidaire, proposent conjointement : participer à la construction du progrès social et des capabilités numériques individuelles et collectives, permettant de prendre une part active dans l’organisation de nos pratiques.” (Source : “Pour une protection sociale des données personnelles”)

Exemple d’openSCHUFA : une campagne de collecte de données a été faite auprès de milliers d’individus pour comprendre l’algorithme de credit-scoring (pointage de crédit) de SCHUFA, bureau de crédit privé allemand. Cela a permis à des individus de pouvoir demander, preuves à l’appui, à corriger des décisions prises par l’algorithme. 

Par ailleurs, l’idée derrière la coopérative de données qui s’intègrerait au modèle MyData/Self Data viserait plutôt à créer un commun : une association d’individus développant des outils et services (chat, moteur de recherche,…) leur permettant de gérer leurs données de A à Z. Il existe plusieurs coopératives de données de ce type : schluss, diglife.coop, open.coop, …

Voir plus particulièrement l’article : Retour sur MyData2018 : quelle(s) approche(s) collective(s) des données personnelles ?

Acteurs qui y travaillent déjà

Lionel Maurel, juriste et bibliothécaire, et Laura Aufrère, doctorante au centre d’Économie de Paris Nord (voir leur article “Pour une protection sociale des données personnelles”), Antonio Casilli, professeur associé à Télécom ParisTech, et Paola Tubaro, chargée de recherche au CNRS, Michel Bauwens, Mariana Mazzucato (professor in the economics of innovation and public value at University College London) ; la communauté MyData (dont la Fing est partenaire, via son programme MesInfos/SelfData territorial) avec l’organisation d’ateliers de type « OurData » ; Valérie Peugeot (Orange Labs/Vecam).